Gilles Van Grasdorff
Flammarion, 2009
Citation de :
Chapitre 3
«Étrange Tibet... Au XIe
siècle, des lamas, fervents adeptes du tantrisme,
se sont pourtant faits brigands et, déferlant sur les villes frontalières de la
Chine de la dynastie Song , attaquent les caravanes de la route de la soie,
pillent, violent et tuent. Mais ce n'est pas tout. Ces lamas, fervents adeptes
du Dharma, pratiquent des meurtres rituels, à la suite desquels ils mangent certaines
parties du corps de leurs victimes en les mélangeant à de la tsampa.»
(p.59)
Chapitre 5
«...se montre de plus en plus réticent aux études
monastiques. Seuls les rites sexuels du
Tantra de Kalachakra retiennent son attention. Commencées à l'âge de quatorze
ans, ses premières initiations se sont faites avec des fillettes de dix ans:
jusqu'à leurs
vingt ans, elles sont considérées porteuses
d'énergies positives.
Victor et Victoria Trimondi expliquent dans Der schatten des Dalai-Lama, L'Ombre du
dalaï-lama, que «dans le Vajrayana, la sexualité est l'événement sur lequel
tout est basé.»
(p.79)
« Le sexe est considéré ci; comme la prima materia, la substance primale brute
qui est utilisée par les partenaires sexuels pour en extraire le pur esprit, de même que l'alcool fort peut être extrait
des grappes de raisin. Pour cette raison, le maître tantrique est convaincu non
seulement que la sexualité contient les secrets de l'humanité, mais qu'elle
fournit aussi le moyen par lequel on peut atteindre la
divinité. » Les Trimondi précisent en outre que «
plus le sexe est
hot, plus le rituel tantrique devient efficace.
Dans le Candamaharosana Tantra par exemple, l'amant avale avec une avidité
joyeuse le liquide qui suinte du vagin et de l'anus de l'amante et goûte sans
nausée ses excréments, son mucus nasal et les restes de nourriture qu'elle a
vomis sur le plancher. Le spectre complet des
déviances sexuelles est présent, même si c'est
sous la forme de rite .»
«Par ces initiations tantriques, la sexualité se
transforme donc en puissance temporelle et spirituelle. Des pratiques secrètes
qui ont été délivrées au sixième dalaï-lama et qui se perpétuent de nos jours
aux degrés les plus élevés de l'usage du Kalachakra dans les monastères du
bouddhisme tibétain. Ainsi, «une seule femme
participe aux étapes initiatiques 8 à 11 du Tantra
du Kalachakra, mais dans les 12 à 15, dix femmes
s'impliquent dans le rite aux côtés du maître. L'élève se doit même d'offrir
des femmes à songourou, et les laïcs qui veulent être initiés d'amener leurs
mères, sœurs, leur épouse, filles ou tantes...
Les moines ayant reçu la consécration ou les
novices ont le droit d'utiliser des femmes de diverses castes qui ne sont pas parentes. Dans s le rite secret lui-même,
les participants font des expériences avec les semences masculines et féminines (sperme et menstruation) ».
(p.80)
«Nous sommes en 1702 et Rigdzin Tsangyang Gyatso a
tout juste dix-neuf ans. Son premier amour l'a quitté mais, depuis, le
dalaï-lama multiplie les aventures avec les courtisanes et serveuses des
tavernes.»
(p.81)
«Le souverain repère immédiatement le régent Sangyé
Gyatso, devenu, au fil des semaines et
des mois, son compagnon de débauches nocturnes. Cette nuit encore sera longue
et il n'est pas rare alors de voir le dalaï-lama interpréter une de ses pièce
de théâtre ou de parodier les Trois Refuges que
sont le Bouddha, le Dharma et
la sangha, c'est-à-dire l'Enseignant, l'enseigné et la communauté, avec un texte que l’on attribue à
Drukpa Kunley :»
(p.82)
«Je prends refuge dans le pénis assagi du vieillard, desséché à la
racine,
renversé comme un arbre mort.
Je prends refuge dans le vagin flasque de la vieille femme, délabré,
impénétrable, comme une éponge.
Je prends refuge dans le Foudre viril du jeune tigre, fièrement dressé,
indifférent à la mort;
Je prends refuge dans le Lotus de la jeune fille, la remplissant de vagues
déferlantes de félicité, et la délivrant de toute honte et inhibition ...»
(p.83)
Chapitre 9
«Le Tantra du
Kalachakra et, de façon plus générale, lebouddhisme tantrique portent la femme
aux nues et la placent en grande estime. Comme dans beaucoup d'autres religions,
elle est vénérée en tant que mère, en tant que sœur, mais aussi en tant qu’épouse,
maîtresse et objet de désir. Le tibétologue Rolf Stein écrit en 1982 : «Que ce
soit dans la religion ou dans le monde, c'est le sexe féminin qui est en tait
l'important... Mieux que cela, on dit que les lamas excellents qui pratiquent la
voie de
l'union sexuelle
doivent vénérer leur femme de gnose (vidya, la compagne rituelle) comme un
instrument indispensable .
Dans le bouddhisme,
le vagin est en fait la porte de la réincarnation, l'accouplement une cérémonie
qui permet l’accession au secret de l'univers. La relation sexuelle est
fondamentalement ritualisée: chaque regard, chaque caresse, chaque forme de contact
reçoit un sens symbolique. Les partenaires recherchent ensemble la voie vers
quelque chose de supérieur à l'acte lui-même. L'acte sexuel leur contére un
pouvoir, un savoir, que l'on n'obtient pas autrement.»
(p.129)
«Un cas isolé ? Pas
exactement puisque, depuis, de nombreuses affaires ont défrayé la chronique.
Notamment l'une concernant la communauté américaine du bouddhisme et l'un de ses maîtres les plus en
vue, Osel Tenzin. Reconnu pour apprécier les pratiques du Traité de Choephel,
et pour son appétit sexuel, le lama avait fini par contracter le Sida dans les
années 1980.
À la même époque, un lama
réincarné surnommé la sagesse folle par ses pairs et ses disciples, était connu
pour son alcoolisme et ses excentricités sexuelles et financières. Par
ailleurs, un article de Jack Kornfeld dans le Yoga Journal révèle, sous le titre de Sex and Lives of the Gurus que, sur cinquante maîtres bouddhistes, hindous
et Jaïns, trente-quatre ont eu des rapports sexuels avec leurs disciples.
En 1994, un autre
lama se voit accusé, lui, d'avoir, sur unepériode de plusieurs années, abusé de
son statut des réincarnation et de guide spirituel pour imposer des relations
sexuelles à des jeunes femmes disciples. De médiation en médiation, le guru tibétain
aurait versé plusieurs millions de dollars à ses victimes...
Le 10 février 1999,
le journal américain The Independent annonce
un autre scandale sexuel sous la plume de Paul Vallely: la philosophe écossaise
June Campbell, traductrice officielle des lamas tibétains, affirme en effet
avoir été «l'esclave sexuelle tantrique» de Kalou Rinpoché, un des lamas
tibétains les plus vénérés au monde. On s'en doute, l'affaire fait grand bruit
: «C'était, dit-elle, comme si j'avais accusé Sœur Teresa d'avoir joué dans des
films porno. » Menacée de mort, l'Écossaise a attendu onze ans avant de parler
de cette histoire. Ses accusations furent vivement démenties par les proches de
celui qu elle dénonce.
Une autre fois, c est
à Samye Ling Centre, en Écosse, que le scandale éclate. Dans un article du Sunday du 10 septembre 2000, Robert
Mendick raconte qu'un moine adulte de Samye Ling a abusé d'une jeune fille de
quatorze ans. Or Samye Ling est un lieu considéré comme le poumon de la culture
tibétaine en Occident, où l’on accueille les artistes amis du dalaï-lama, tels
Richard Gere ou David Bowie.
Le 10 juin 2009, j'ai
demandé au dalaï-lama de bien vouloir répondre à quelques questions, notamment
sur le fait que, depuis un certain temps, des articles de presse et des livres évoquent
les dérapages de lamas de renom, accusés d'agressions sexuelles et de viols ou
encore d'avoir des « esclaves sexuuelles tantriques». Une vingtaine de jours
plus tard, le 4 juillet, Sa Sainteté le quatorzième dalaï-lama Tenzin Gyatso
répondra, par l'intermédiaire de son secrétaire Chhime R. Chhoekyapa :
« Cher Monsieur Gilles Van i Grasdorff,
Veuillez excuser notre retard à répondre à votre courrier électronique du
10 juin 2009, dans lequel vous demandiez des éclaircissements de la part de Sa
Sainteté comncernant le bouddhisme à certaines des questions soulevées dans
votre lettre. Sa Sainteté a été très occupée ces dernières semaines, qui ont
inclus de grands voyages. Nous n'avons donc pas été en mesure de répondre plus
tôt. Nous espérons
que vous comprendrez.
Dans le même temps, nous voudrions qu'il soit bien clair pour vous dès le
départ que tout comportement non conventionnel n'est pas en accord avec les
enseignements de Sa Sainteté et la pratique. Dans le bouddhisme tibétain aussi
il y a des personnes qui s'égarent et si elles ne respectent pas leurs vœux,
des mesures appropriées sont prises. Dans la mesure où nous en sommes
conscients, ceux qui ne peuvent pas garder leurs vœux monastiques, etc. ...
quittent le monastère... »
Ces histoires de sexe
dans les lamasseries et les monasteries occidentaux peuvent choquer nos esprits
occidentaux redevenus pudibonds mais il est important de souligner que les
lamas tibétains n'ont jamais cessé d'utiliser des « esclaves sexuelles» dans les
rites tantriques, dont le Kalachakra. Et ce au nom d'une tradition de pratiques
secrètes qui remonte au VIIIe siècle, et à ce temps lointain où Padmasambha
introduisait le bouddhisme au Tibet. Le fondateur de l'école Nyingma avait
lui-même cinq « esclaves sexuelles tantriques » parmi ses disciples. Dès lors,
on
peut dire qu'en 2009,
rien n'a vraiment changé au pays des lamas tibétains et que certains - des
brebis galeuses - s'égarent. Si ce n'est que des femmes comme June Campbell et
des chercheurs comme Victor et Victoria Trimondi osent briser la loi du silence
imposée par les propagateurs du Tantra du Kalachakra.
(p.133-135)
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